lundi 22 mai 2006

La star et "les jeunes"...

A l'entrée de mon Monoprix, ce soir, un présentoir avec Aujourd'hui (Le Parisien), Yannick Noah en Une... je l'ouvre et lis la réponse de la star du tennis et de la chanson à la question de savoir son avis sur les émeutes de novembre 2005 :

"Les jeunes ont gueulé, ils se sont mis en danger", puis Noah de dire sa déception que les "les jeunes" n'aient pas obtenu davantage que quelques mesures symboliques.

Cette formule de Yannick Noah,"Les jeunes ont gueulé, ils se sont mis en danger", est scandaleuse à plus d'un titre.

D'abord parce qu'en désignant les émeutiers par l'expression "les jeunes", il pratique l'amalgame : comme si l'ensemble de la jeunesse de notre pays avait participé aux actions ultra-violentes de ces émeutes !

Lorsque Sarkozy dénonce à juste titre non pas, loin s'en faut, l'ensemble des jeunes mais une petite minorité qualifiée par lui de "racaille", on feint de croire qu'il désignerait ainsi toute la jeunesse. Mais le constat est là : ce n'est pas le politicien de droite qui en l'occurence est dans l'amalgame, mais bien le chanteur cool... Ce type d'expressions, "les jeunes pensent ceci...", "les jeunes font cela..." procède de généralisations presque à coup sûr abusives. A noter de plus, à propos de cette expression précise, "les jeunes", l'aveu récent du médiateur du Monde, reconnaissant dans l'une de ses chroniques l'habitude qu'avait prise le journal en question d'employer systématiquement ladite expression lorsque les informations dont disposaient les journalistes indiquaient que la population concernée était majoritairement composée de personnes issues des immigrations maghrébines ou africaines. En l'occurence, si j'en crois certaines observations récemment publiées au sujet des émeutes, c'est exactement ce que fait ici Noah.

Ensuite, dire que les émeutiers ont "gueulé" est un euphémisme tel que cela revient à nier purement et simplement la réalité des délits et crimes commis : mettre le feu à des centaines de voitures, lancer des coktails molotov dans des bus remplis de passagers, mettre le feu aux écoles, s'attaquer aux pompiers, tirer à balle réelles sur les fonctionnaires de police, tout cela, pour Noah, c'est "gueuler".

Et en "gueulant", les "jeunes"... se sont mis en danger. Les criminels qui ont mis le feu à un bus dans lequel se trouvait une vieille femme handicapée n'ont pas mis en danger la vie de cette personne, pas du tout, c'est eux-même qu'ils ont mis en danger !

Yannick Noah s'affichait récemment en slip sur les murs de nos villes, c'est très cool, mais ce n'était pas son dernier exploit : il réussit en une phrase courte à faire trois mensonges. Champion !

2 commentaires:

Anatole a dit…

En réponse à des questions concernant mon point de vue sur Sarkozy, je dois préciser que je ne suis pas, loin s'en faut, un supporter de Sarkozy; en particulier, j'avais été très choqué qu'il prétende "nommer un préfet musulman" : ce n'est pas le fait qu'un préfet soit musulman qui me choque, mais le fait qu'il soit nommé "en tant que musulman". C'est une entorse à l'esprit républicain : la république est constituée d'individus, non de communautés (vaste et difficile question, cela dit...).

Quant aux racailles, c'était peut-être mal venu de la part d'un ministre en exercice d'employer ce genre de vocabulaire, mais je crois me rappeler que c'était dans le contexte d'une réponse spontannée à une interpellation de la part d'une habitante d'une cité, et non pas lors d'une interview par un journaliste ou lors d'un meeting : Sarkozy a alors employé sans langue de bois le langage usuel dans les cités, puisque "kaï-ra" est une façon courante dans les cités de désigner aussi bien petites que grandes... racailles.

Et encore une fois, les propos de Noah sur "les jeunes" me paraissent infiniment plus choquants.

discussion a dit…

> comparer noah et sarko n'est pas évident
> car noah ne fait pas de politique
> on ne sais pas dans quel contexte il a dit cela

D'accord, mais :

on sait tout de même dans quel contexte Noah s'est exprimé, celui d'une interview qu'il n'a pas désavouée;

par ailleurs dans cette interview il dit songer à s'engager politiquement, sans savoir sous quelle forme; il assume en tout cas une parole publique.


>
> il n'est pas en train de penser aux réactions
> il devait penser à certaines catégories il s'est peut etre mal exprimé
> etc..


Oui, mais... il n'y a pas eu de réactions négatives : elles auraient été l'occasion pour Noah de préciser sa pensée, de dire qu'il s'est mal exprimé, etc... (par contre, Le Nouvel Obs s'est empressé de compter Noah parmi ses alliés dans le combat anti-Sarkozy...)