vendredi 7 décembre 2007

Kadhafi au pays des droits de l'homme

Manifestations interdites contre Kadhafi



Jusqu'à vendredi 7 décembre 2007,"on" a fait courir le bruit que la visite de Kadhafi était reportée à janvier 2008 (voir l'article de la Tribune du 20 novembre dernier, reproduit ci-après); soudain, vendredi en fin de journée, juste avant le week-end, l'annonce est faite que Kadhafi arrive lundi 10 décembre. Dans le même temps, apprend-on lundi 10 décembre dans la soirée par une dépêche de l'AFP, le préfet de police avait pris cinq arrêtés d'interdiction visant "les manifestations de soutien ou d'opposition" à la visite du colonel Kadhafi à Paris "car elles étaient susceptibles de troubler l'ordre public et la visite officielle".


Le 10 décembre 1948, les 58 Etats Membres qui constituaient alors l'Assemblée générale ont adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme, à Paris.

Le 10 décembre 2007, jour anniversaire de cette déclaration, Paris reçoit en grandes pompes pour une semaine entière le créateur d'un "prix des droits de l'homme" : le dictateur libyen Kadhafi et la police interdit toute manifestation anti-Kadhafi.

Quelques mots sur le prix Kadhafi des droits de l'homme : ce soit-disant prix des droits de l'homme a notamment été décerné au révisioniste Roger Garaudy (2002), à l'islamiste Farrakhan (1996), au dictateur Fidel Castro (1998), celui-là même dont le discours en 2001 à Durban fût acclamé aux cris de "morts aux Juifs", à son disciple Hugo Chavez (2004), l'ami d'Ahmadinejad, à l'antisémite Mahathir bin Mohamad (2005) dont le discours sur le thème " les Juifs dominent le monde" avaient fait grand bruit en octobre 2003, ainsi qu'à Jean Ziegler, cofondateur de ce prix, qui l'a modestement refusé, et qui était il y a encore quelques jours interviewé sur France 2 pour ses "lumières" sur le racisme...

Ainsi, notre pays s'apprête à célébrer le soixantième anniversaire de la déclaration universelle des droits de l'homme en dressant une tente à l'hôtel Marigny à l'un des leaders de l'usurpation mondiale des droits de l'homme, un dictateur qui vient de déclarer à Lisbonne : "il est normal que les faibles aient recours au terrorisme», et en arrêtant ceux, au demeurant une poignée, qui souhaitaient manifester pacifiquement contre le dictateur libyen.

Alors que l'UMP demande le "respect" (!) pour Kadhafi, que François Fillon conseille aux mécontents de tourner sept fois leur langue dans la bouche avant de dénoncer Kadhafi et que, plus scandaleux encore, ce conseil de Fillon est suivi par la LDH qui passe totalement sous silence la mascarade du "prix des droits de l'homme" de Kadhafi et l'activisme antisémite sous couvert d'attaques permanentes contre Israël, jusqu'à, par la force des choses, se fendre lundi 10 décembre dans la journée de deux communiqués, l'un pour dénoncer la présence à Paris d'un chef militaire israélien, un autre dénonçant de façon générale la politique de Sarkozy et dans lequel la réception de Kadhafi est comme noyée dans le flot, alors que quelques leaders de l'opposition se scandalisent d'une réception dont rien ne dit qu'au pouvoir ils n'en n'aurait pas fait autant (et, après tout, l'argument économique des contrats signés ne peut pas non plus être écarté si facilement : qu'en serait-il alors de nos relations avec la Chine ?), alors que la police interdit à Paris toute manifestation contre Kadhafi, deux voix s'élèvent, assez claires, pour dire l'enjeu symbolique de la présence à Paris de Kadhafi en cette journée des droits de l'homme :

- la voix, courageuse, de l'admirable Rama Yade, que la police n'a pas réussi à faire taire au nom de l'ordre public,

- un communiqué très clair du CRIF :


Kadhafi à Paris : ce qu’il ne faut pas oublier
10 décembre 2007 - Communique de presse du CRIF
Au moment où le colonel Kadhafi entame sa visite officielle en France, ce lundi 10 décembre, journée mondiale des Droits de l’Homme, le CRIF n’oublie pas que la Libye :



- a organisé et encouragé de nombreux attentats meurtriers,
- a déclaré, par la voix du Colonel Kadhafi, le 7 décembre 2007 à Lisbonne qu’il était « normal que les faibles aient recours au terrorisme »,
- a régulièrement utilisé la torture, y compris sur le personnel soignant bulgare, totalement innocent, qui a été incarcéré dans des conditions terrifiantes, pendant plusieurs années avant d’être libéré cet été, notamment grâce à l’action de la France.
Il serait scandaleux que la Libye, étant donné son « palmarès » en la matière, soit chargée de préparer la conférence dite de Durban 2, dont le CRIF espère qu’elle ne sera pas une répétition de Durban 1 en 2001, qui s’est transformé en meeting antisémite. Le CRIF demande au Président de la République et au gouvernement de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter qu’une telle situation ne puisse se reproduire.
- n’accepte pas de façon permanente l’existence de l’Etat d’Israël, une ligne de conduite encore confirmée par le propre fils du Colonel Kadhafi qui refuse l’entrée d’Israël dans l’Union méditerranéenne, ce projet de paix initié par la France.
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Et, en effet, l'enjeu symbolique de la présence du dictateur libyen en France aujourd'hui est bien là, dans la mise sur orbite, aux dépends de la France, de l'idéologie des "droits de l'homme" version Kadhafi ou version LDH, des "droits de l'homme" fondamentalement anti-israéliens, de "l'alliance des civilisations" version "interdiction du blasphème", de l'antiracisme version antisémitisme à Durban...

Certes, notre pays a connu pire honte : Vichy et la collaboration au génocide des Juifs par la police française, le massacre des Arabes à Paris en octobre 1961, le rôle de notre pays dans le génocide du Rwanda, sans compter quelques autres que je connais et quelques autres que j'ignore...

La honte, en outre, n'est pas nécessairement dans le fait du faire du commerce avec Kadhafi. Mais elle est certainement dans le fait de lui dérouler un tapis rouge, dans le fait d'interdire les manifestations anti-Kadhafi (c'est vrai, il n'a pas l'habitude, Kadhafi, des manifestations, cela pourrait heurter sa sensibilité, s'il voyait cela à la télé...), la honte c'est aussi de prétendre qu'il serait sur le bon chemin, alors que les tortures n'ont pas cessé et que la propagande pour la légitimation du terrorisme et pour la promotion de l'antisémitisme le plus nazifiant se portent mieux que jamais.

Une semaine de honte commence, donc.

Formons au moins le voeux qu'elle soit pour nos concitoyens l'occasion d'entendre parler de Jean Ziegler, co-fondateur avec Kadhafi de son prix des droits de l'homme, du laboratoire de haine qu'est le Conseil des Droits de l'Homme (ONU), de Durban 1 et 2, de la tromperie sur la marchandise qu'est le concept d'origine iranienne d'"Alliance des civilisations" que l'on se prépare à nous vendre en 2008...


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PS : Le bruit a couru que la visite de Kadhafi était reportée à Janvier 2008, comme en témoigne l'article de La Tribune parue le 20 novembre dernier, dont le début est reproduit ci-après. Puis, soudainement, le vendredi 7 décembre en fin de journée, l'annonce est faite de la visite à Paris de Kadhafi à partir du lundi suivant, juste après le week-end, du 10 au 15 décembre 2007. On peut se demander si une telle manoeuvre, assez grossière, ne visait pas à désamorcer toute manifestation contre Kadhafi.

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La Tribune.fr - 20/11/07 à 19:20

Diplomatie

La venue du colonel Kadhafi à Paris reportée à janvier

Prévue initialement à la mi-décembre, la visite officielle du guide de Tripoli a été reportée en janvier. L'agenda de Nicolas Sarkozy en cette fin d'année est trop chargé.

Selon nos informations, la visite à Paris du colonel Kadhafi prévue mi-décembre a été reportée à janvier, selon des sources concordantes. Officiellement pour des raisons d'agenda trop rempli de Nicolas Sarkozy, explique-t-on à la Tribune.


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2 commentaires:

Gédéon a dit…

Bernard Kouchner a déclaré lundi 26 novembre que l'arrestation de Garry Kasparov lors de manifestations à Moscou méritait des explications...

Question : l'arrestation d'opposants à Kadhafi, lundi 10 décembre à Paris, place du Trocadéro, qui "avaient demandé mille fois l'autorisation" de manifester, mérite-t-elle des explications ?

Anatole a dit…

lu sur http://www.tawalt.com

Aujourd’hui, à 12h00, des militants, majoritairement des lybiens, ont prévu de manifester Place saint Augustin pour célébrer la journée internationale des droits de l’Homme et dénoncer la venue du dictateur Kadafi en France.
Comme la Place saint Augustin était encerclée par les forces de l’ordre, les manifestants ont alors décidé d’aller à la place du Trocadéro. Arrivés sur place les forces de l’ordre étaient encore plus nombreuses et ont procédé à l’arrestation d’une cinquantaine de personnes.

Paris le 10/12/2007
à 16h00